Castelnou : Étiennette, à la recherche des temps perdus

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Qu’il est délicieux ce charmant petit village médiéval ! Lové au coeur du maquis catalan environné de cistes, embaumé de genets, de bruyères et cerné de chênes méditerranéens… C’est un havre de quiétude. Il y a bien encore quelques vignes qui s’obstinent à pousser, rares vestiges de l’activité agricole d’antan du village. Ici, dans les Aspres, écrasées par la chaleur torride des Étés, seules les cigales s’égosillent à chanter à tue-tête à couvrir le silence ! Pas la moindre brise. Castelnou ressemble à une oasis de fraîcheur dans un océan de torpeur.

Castelnou ! Fa temps….

Mais qu’il est le loin le temps où ce petit village était tout consacré à l’agriculture ! Où les ruelles résonnaient du pas lent des mules et des bourricots. Chacun se connaissait. « Fins aviat! » (à bientôt) « Bon dia » (Bonjour) Lançait-on pour ponctuer les conversations. L’accent était chantant, rocailleux, catalan ! L’époque où les « ninots » (Petits enfants) descendaient le sentier escarpé menant à la fontaine pour aller chercher l’eau…. En ce temps-là, l’eau était précieuse ! La vie, toute consacrée aux labeurs des champs. Étiennette l’a connu ! ce temps-là…

Étiennette

Etiennette de Castelnou, ou le secret des herbes (Photo La Gazette Catalane)
Etiennette de Castelnou, ou le secret des herbes (Photo La Gazette Catalane)

Étiennette a quitté son village natal Camélas pour franchir  les quelques kilomètres qui séparent de Castelnou pour s’y marier. Il y a quelques années encore, dés que vous franchissiez la « Porte » de Castelnou, là, sur la gauche, vous découvriez une boutique extraordinaire, inclassable ! Une boutique tenue par Étiennette, depuis des décennies, écolo dans l’âme avant la mode. Les herbes de nos campagnes n’avaient aucuns secrets pour elle ! Aussitôt franchie la porte de surprenantes effluves de parfums de la garrigue vous titilliez les narines.

Etiennette confectionnait ses bouquets de fleurs sauvages (Photo Gazette Catalane)
Étiennette confectionnait ses bouquets de fleurs

Là, vous étiez transporté vers votre imaginaire, vos souvenirs d’enfance, vers l’époque révolue où il faisait bon vivre, où chacun appréciait à sa juste mesure le moment et l’instant présent. Illico, c’était l’envoûtement ! Suspendus au plafond, des bouquets d’immortelles sauvages séchaient patiemment ; plus loin, des artichauts révélaient leurs fleurs d’un beau bleu lumineux… La monnaie du Pape était omniprésente, ainsi que de merveilleux petits chapeaux délicatement tressés par Étiennette qui embaumaient la lavande. Mais le plus surprenant, c’était ses poèmes ! Elle qui n’était pas allée trop longtemps à l’école…

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Extraits du poème : « La fount dels ninots » (Fontaine des enfants)

«C’était ainsi notre temps »
«A cette époque là on se sentait heureux et tout nous semblait beau,
Pourtant dans nos maisons, nous n’avions pas encore l’eau
Avec nos récipients on descendait vers la fontaine
Il fallait bien en remonter avec nos cruches pleines (…)
Bien sûr à cette époque là, nous n’avions pas beaucoup de commodités
On se déplaçait qu’en vélo le plus souvent à pied
Quand on voulait déjeuner… il fallait allumer le feu,
On devait aller ramasser un peu de bois se que l’on trouvait de mieux» (…)
Morceau choisi de Poème écrit par Etienne en 1994

Aujourd’hui, dans les venelles et ruelles, l’accent a hélas bien changé… Rares sont les catalans de souche vivants encore au village ! Villégiatures et demeures de weekends, peuvent-elles favoriser les liens sociaux ? Notre beau Pays Catalan, jour après jour, n’est-il pas entrain de perdre sa singulière identité ? Sa culture n’est-elle pas (volontairement) diluée pour effacer toutes ses particularités et la catalanité ?

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